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CONFÉRENCE « QU’EST-CE QUI MOTIVE À APPRENDRE ? ». RETROUVEZ LE COMPTE-RENDU !

23/04/2018

Le 5 avril, malgré les difficultés de transports, des enseignants venus de nombreux établissements ont participé à une conférence sur le thème « Qu’est-ce qui motive à apprendre ? » animée par Philippe Korda au collège Boris Vian à Paris.

Découvrez les notions clés et études présentées à cette occasion.

Qu’est-ce qui motive à apprendre ? 

Catharine Cox dès 1926 s’est rendu compte que le quotient intellectuel à 10 ans ne déterminait pas la réussite à l’âge adulte, à l’inverse de la persévérance dans une discipline. Ces travaux novateurs ont été des années plus tard appuyés par les découvertes d’Anders Ericsson, qui a découvert en 1992 que le facteur qui prédisait l’atteinte de très hauts niveaux de compétences, dans différentes disciplines, n’était pas une quelconque prédisposition, mais bien l’accumulation de travail de perfectionnement. Aujourd’hui Angela Duckworth est parvenue à trouver que le « grit », qui est un mélange de passion et de persévérance, est un bien meilleur prédicteur de la réussite scolaire que le quotient intellectuel. Or, selon ses recherches, la passion est relativement courante, mais la persévérance beaucoup moins !
Walter Mischel est l’auteur de la fameuse expérience du marshmallow. En 1962, ce psychologue a étudié la volonté chez des enfants de 4 ans. Ils étaient assis face à un bonbon et l’expérimentateur leur disait que s’ils attendaient avant de le manger, ils pourraient en avoir un deuxième. Plusieurs années après, il a constaté que les enfants qui avaient fait preuve de volonté dès leurs 4 ans avaient eu un meilleur indice de masse corporelle et de meilleurs diplômes. Il en a donc déduit que ce qui détermine le succès scolaire, c’est avant tout la capacité de l’élève à contrôler ses impulsions. En effet, très vite les élèves doivent arbitrer entre une satisfaction hypothétique et à long terme (obtenir de bons résultats scolaires) et une satisfaction certaine et immédiate (bavarder ou jouer par exemple).
La question qui nous occupe ici est donc la persévérance scolaire. Quels sont les différents leviers de la motivation des élèves à apprendre ?

1. Le groupe
Selon les travaux de Kurt Lewin, l’élève est inséré dans de nombreux groupes comme la classe ou la famille qui exercent sur lui une « pression informationnelle » et une « pression de conformité » dont il n’est absolument pas conscient ».

2. L’identité perçue
Les élèves ont une image d’eux- mêmes qui les oriente dans leurs décisions quotidiennes. Timothy Wilson explique que nos comportements sont déterminés par l’histoire que nous nous racontons à nous-mêmes. Cette histoire porte sur notre passé, notre présent et notre avenir mais également sur ses valeurs et sur les personnes auxquelles nous pouvons nous identifier. D’autres études, notamment celles de Geoffrey Cohen, montrent que lorsque les élèves issus de catégories sociales victimes de stéréotypes négatifs prennent conscience de leurs valeurs personnelles, leurs résultats scolaires s’améliorent.

3. La volonté
Roy Baumeister a commencé par étudier l’estime de soi, mais il a constaté l’absence d’effet de l’augmentation de l’estime de soi sur les performances scolaires. Il a alors consacré ses recherches à la volonté et s’est rendu compte que « l’autodiscipline est la reine des compétences, puisque c’est celle qui permet de développer toutes les autres ». La volonté est donc un levier extrêmement important et Kelly McGonigal a popularisé différentes stratégies pour développer sa volonté comme le respect d’une bonne hygiène de vie, le fait de fréquenter des personnes qui font preuve de volonté dans le domaine considéré ou encore le fait de penser à ce que ses « héros » feraient dans la même situation.

4. Les habitudes
Dès la fin du XIXème siècle, William James avait remarqué que nos actions déterminaient largement notre état interne. Depuis, de nombreuses études ont confirmé son intuition et l’on sait aujourd’hui que « pour acquérir une qualité, il faut faire comme si on la possédait déjà » ! De plus, les travaux de Wendy Wood, popularisés par le best-seller du journaliste Charles Duhigg (The Power of Habit), montrent que les habitudes acquises sont les meilleurs prédicteurs des comportements à venir. Les habitudes s’inscrivent dans des séquences d’évènements automatiques ne nécessitant pas de ressources cognitives. Les habitudes sont liées à des contextes et si un élément se modifie, c’est l’ensemble de l’habitude qui est ébranlé.

5. Les émotions
Selon David DeSteno, ce qui nous pousse à faire l’effort d’apprendre, ce sont trois émotions qui sont la gratitude, la compassion et la fierté. Toutes aident à résister aux impulsions. Jessica Tracy ajoute à propos de la fierté que « la plus grande motivation de l’être humain est le désir de se montrer à la hauteur des attentes des autres et de ses propres attentes vis-à-vis de lui- même ».

6. La projection dans l’avenir
Il semble que la capacité de projection vers l’avenir soit un puissant levier de la motivation à apprendre. David Herschfield explique que si l’on veut que les individus agissent dans le présent pour préparer leur avenir, il faut les aider à rapprocher le futur et à s’imaginer dans la peau du « futur soi ». Ca implique donc que les collégiens s’imaginent ce que pourrait être leur vie dans quelques années. De plus, on se rend compte notamment, grâce aux travaux de David Yaeger, qu’avoir des motivations intrinsèques et des buts de maîtrise de compétences permet d’augmenter la persévérance scolaire, et cela d’autant plus si elles sont renforcées par des motivations altruistes. A l’inverse, les motivations extrinsèques sont corrélées au décrochage scolaire.

7. La confiance dans sa capacité à progresser
Albert Bandura a découvert que ce qui pousse un individu à entreprendre une tâche, c’est le fait qu’il pense être capable de l’accomplir. On appelle ça le sentiment d’efficacité personnelle. Ce sentiment est évolutif et il est favorisé par les encouragements, l’observation des pairs et l’expérience de maîtrise. Carol Dweck a constaté que les élèves qui s’amélioraient étaient ceux qui pensaient que leur intelligence était modulable (le growth mindset) et à l’inverse, ceux qui stagnaient avaient une vision fixe de leur intelligence (le fixed mindset). En effet, les élèves à la vision modulable de l’intelligence persévèrent davantage, se confrontent plus aux difficultés que ceux à la vision fixe. Martin Seligman a découvert le phénomène de l’impuissance acquise, lorsqu’un élève a le sentiment que, quels que soient ses efforts, il n’aura aucun résultat. Il dit qu’il est essentiel d’apprendre à interpréter ses échecs par des causes précises, non permanentes et en partie externes. Céline Darnon ajoute que le fatalisme social décourage certains élèves de milieu modeste mais que la croyance en une parfaite méritocratie scolaire produit les mêmes effets. Enfin, Gabriele Oettingen a mis au point une méthode en quatre étapes qui accroît la propension des élèves à mettre en œuvre leurs bonnes intentions.

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